Optimiser le financement de votre projet passe souvent par l'exploitation judicieuse des subventions publiques, des ressources non dilutives qui revêtent une importance cruciale. Certaines de ces subventions sont même spécifiquement conçues pour soutenir les activités de recherche et développement (R&D). Leur complémentarité avec le Crédit d'Impôt Recherche (CIR) génère fréquemment des interrogations sur la meilleure manière de les intégrer dans le calcul du crédit d'impôt. Cet article vise à vous fournir des éclairages essentiels sur les règles à suivre, vous permettant ainsi de maximiser votre avantage fiscal.
J'ai obtenu une subvention publique, mon projet peut-il être éligible au CIR ?
C’est une question que se posent fréquemment entrepreneurs ou chefs de projets. La réponse est OUI : votre projet, quand bien même serait-il déjà partiellement financé via une subvention ou une avance remboursable, pourra être pris en compte au CIR, sous réserve qu’il respecte les critères d’éligibilité. L’obtention d’une subvention publique pour un projet de R&D n’est absolument pas un frein à l’éligibilité de votre projet; au contraire, elle la renforce puisqu’elle constitue un indicateur de R&D pertinent, reconnu par l’administration.
Subventions publiques et CIR : quelles règles pour la déduction ?
Cela coule de source mais il n’est pas inutile de le rappeler, une dépense de R&D ne peut être financée simultanément par deux sources d'aide publique, à savoir le Crédit d'Impôt Recherche (CIR) et une subvention publique. Conformément aux règles en vigueur (art. 244 quater B, III du CGI), les entreprises sont donc tenues de déduire des bases de calcul de ce crédit d'impôt, les subventions publiques reçues pour des activités éligibles au CIR, qu'elles soient définitivement acquises (i.e. une subvention) ou remboursables.
Si le projet pour lequel vous obtenez une subvention englobe des opérations ouvrant droit au crédit d’impôt et d’autres opérations n’y ouvrant pas droit, alors, seule la fraction de cette subvention afférente aux opérations ouvrant droit à crédit d'impôt doit être déduite (voir tableau ci-dessous). Nous verrons cependant par la suite que le juge de l’impôt a pu avoir une lecture différente (lors de contentieux suite à des contrôles fiscaux sur le CIR), sans que cela ne remette en cause, selon nous, cette règle générale.
Dans le cas particulier des avances remboursables (sorte de prêt à taux et conditions avantageux), l’entreprise devra déduire de la base de calcul du CIR les montants perçus au titre des avances, mais pourra réintégrer les montants remboursés (au cours de l'année correspondante).
Enfin, pour les prêts à taux zéro pour l'innovation (PTZI), la règle demeure inchangée : ces prêts sont assimilés à un financement public de projet de recherche. Par conséquent, ils sont pris en considération dans la base de calcul du crédit d'impôt selon les mêmes modalités que les avances remboursables, impliquant déduction et réintégration.
Quand faut-il déduire la subvention du CIR ?
Là encore la question se pose régulièrement : faut-il déduire la subvention l’année au cours de laquelle elle est perçue ou au fil de l’eau, selon les dépenses engagées?
Si l’on s’en tient à la doctrine administrative, la déduction de la subvention de la base de calcul du crédit d’impôt doit être réalisée l’année ou les années au cours desquelles les dépenses sont exposées.
Prenons un exemple: Vous êtes lauréat d’un appel à projet et vous avez obtenu une subvention de 50 000€ pour un projet dont le budget global est de 85 000€.
Cas numéro 1: Le versement à lieu en novembre de l'année N et vous commencez à engager des dépenses la même année. Dans ce cas, dès l’année N, vous devez déduire la subvention au prorata des dépenses exposées ouvrant droit au crédit d’impôt .
Cas numéro 2: Un premier versement à lieu en année N mais vous commencez à engager des dépenses l’année suivante (N+1). Vous ne déduisez rien l’année N du versement et vous commencez à déduire la subvention en N+1, au prorata des dépenses exposées ouvrant droit au crédit d’impôt.
Les subventions publiques au cœur de l'actualité
a) Précision sur la notion de "publique"
Comme mentionné précédemment, le Code Général des Impôts (CGI) énonce clairement que les aides publiques reçues par les entreprises pour des opérations éligibles au CIR doivent être déduites des bases de calcul de ce crédit d'impôt. Jusqu'à récemment, la notion “d'aide publique” dans le cadre du CIR n'avait pas été définie de manière précise. Cependant, une avancée significative a été réalisée grâce à un arrêt du Conseil d'État en date du 12 Juillet 2023 (463363), qui définit une aide publique comme “toute aide versée à raison d'opérations ouvrant droit au crédit d'impôt par une personne morale de droit public”.
Cette clarification importante restreint désormais la déduction des subventions publiques aux seules aides versées par des entités spécifiques, à savoir l'État, les collectivités territoriales, et les établissements publics. Toutefois, une zone d'incertitude subsiste concernant les subventions de BPIFrance, un organisme privé investi d’une mission de service public. Dans l'attente d'éclaircissements supplémentaires, il est recommandé de maintenir la déduction de telles subventions, tout en demeurant vigilant face à d'éventuelles évolutions législatives futures.
b) Déduction de l’intégralité d’une subvention
La Cour Administrative d’Appel (CAA) de Lyon a pris une décision surprenante le 21 septembre 2023 (21LY03203), stipulant que toute aide financière publique destinée à soutenir une activité éligible au Crédit d’Impôt Recherche (CIR) doit être intégralement déduite de la base de calcul, même si toutes les dépenses financées par cette aide ne sont pas éligibles au CIR. Cette décision va en effet à l'encontre de la règle générale, que nous avons rappelée précédemment dans cet article.
Au cas particulier, une entreprise bénéficiaire du CIR avait reçu un financement de l'État couvrant 40% des coûts de son projet. Confrontée à une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a insisté sur la déduction totale de la subvention, indépendamment de l'éligibilité des dépenses. La société, qui avait suivi les règles en vigueur en déduisant seulement la part correspondant aux dépenses éligibles, a contesté cette position mais la CAA a statué en faveur de l’administration fiscale.
La justification reposait sur les termes de la convention de soutien de l'État, indiquant que la subvention était liée à un programme de R&D pour lequel la société avait été spécialement créée.
La Cour a ainsi adopté une interprétation stricte, que nous jugeons en contradiction avec la doctrine administrative. Sauf cas très spécifique, nous ne suggérons donc pas de modification de la règle, et seule la quote part de la subvention correspondant à des dépenses éligibles au CIR doit être déduite.
****
Besoin de financements pour votre projet innovant ? Suivez les appels à projets du moment grâce à notre Newsletter ⬇️
Comments